Pour les plus démunis, le pro deo finance l’assistance d’un avocat, lorsqu’ils doivent aller en justice. Les détenteurs d’un haut revenu, eux, ont les moyens d’y faire face. Mais pour la classe moyenne – soit la grande majorité – le coût d’un procès est très souvent dissuasif. C’est à eux que Koen Geens (CD&V) pense.
Son projet est de créer une assurance protection juridique pour tous. Interpellé par Olivier Chastel (MR), le ministre de la Justice vient d’en préciser les contours. Il tente, dit-il, d’accorder les représentants des avocats et des assureurs sur une formule. Et pour qu’elle soit attirante, il promet une déductibilité fiscale « tangible » des primes.
Flop du système Onkelinx
Le dossier, en fait, se négocie depuis des mois. Les discussions buttent sur d’importants écueils, pas forcément insurmontables. « En 2006, Laurette Onkelinx avait mis une formule sur pied, mais elle a fait un flop » , résume Jean-Marc Picard, administrateur en charge de l’accès à la Justice au sein de l’Ordre
des barreaux francophones. « Elle coûtait 144 € par an, mais déductibles à hauteur de 13 €, et ne couvrait ni le droit familial – les divorces – ni la construction. »
Koen Geens entend faire couvrir aussi ces deux domaines, ainsi que le droit administratif ou celui de la consommation. Seule grosse exclusion : le droit pénal.
Les assureurs lui ont remis un projet. Leur gros problème : « Nous avons besoin d’une prévisibilité des coûts afin de déterminer le montant des primes, ainsi que de moyens pour séduire le public, pour répartir au maximum la charge de nos interventions » , explique le porte-parole d’Assuralia, Wauthier Robyns.
La déductibilité fiscale pourrait répondre à la seconde inquiétude. Pour la première, les assureurs proposent aux avocats de travailler avec des barèmes. Exemple : 750 € pour un divorce.
« Ce volet est clairement insatisfaisant pour le moment » , reconnaît M e Picard. « Pour un divorce par consentement mutuel, ce montant pourrait suffire. Mais si l’affaire est plus compliquée… Qui plus est, instaurer des barèmes pour les avocats, c’est très délicat. Et si, à cause de cela, peu acceptent de jouer dans la pièce, l’assurance risque de ne pas fonctionner correctement… »
Qui plus est, les avocats ont peur, s’ils acceptent des barèmes dans ce cadre, qu’on considère qu’ils doivent aussi les appliquer en dehors de l’assurance.
Parades
Parade possible : les considérer comme des plafonds d’intervention. Au-delà, les honoraires seraient à charge de l’assuré. Autre possibilité : faire jouer la commission mixte assureurs-avocats qui existe déjà, si les honoraires sont jugés trop élevés. Elle fonctionne très bien paraît-il, mais il faudrait alors en rémunérer les membres.
Les ténors demandent également que le « pré-contentieux » – soit les négociations d’un accord amiable entre assureurs qui règlent 80 % des litiges – soit amélioré. En clair : que quand la partie adverse prend un avocat, on y ait droit aussi. Et que si l’assuré n’est pas d’accord avec une proposition de compromis, on lui précise qu’il peut consulter un avocat payé par l’assureur, sauf si ce qu’il a conseillé de faire échoue.
Source: http://www.koengeens.be/fr/news/2016/01/29/une-assurance-justice-pour-tous